Épisode 13
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Sardines de campagneSardines de campagne
« Rester dans l’émotion, chaque fois que je la vois »
Bookmakers #6 - L’écrivain du mois : Dany Laferrière
Né en 1953 à Port-au-Prince (Haïti), élu en 2013 à l'Académie Française, Dany Laferrière est l'auteur savoureux d'un vaste cycle autobiographique de trente-deux ouvrages, parmi lesquels « Comment faire avec l'amour avec un Nègre sans se fatiguer » (1985), « Vers le Sud » (2006) ou « L'Enigme du retour » (2009), complété aujourd'hui par des ouvrages entièrement écrits et dessinés à la main, dont le titre du dernier, publié cette année, dit beaucoup sur sa vie : « L'Exil vaut le voyage ».
En partenariat avec Babelio
(3/3) Revers de Sud
« J’écris dans mon lit, je lis dans mon bain : je suis un homme horizontal. » Mais ce « spécialiste mondial de la sieste », comme dit parfois Dany Laferrière en parlant de lui-même, travaille tout de même beaucoup. En 1990, cinq ans après la sortie de son sulfureux premier ouvrage, l’écrivain quitte Montréal pour Miami, en famille. Aux Etats-Unis, il écrit dix romans en douze ans, dont le fameux cycle haïtien, l’ossature de son œuvre : « L’Odeur du café » (1991), « Le Goût des jeunes filles » (1992), « Cette grenade dans la main du jeune Nègre est-elle une arme ou un fruit ? » (1993), « Pays sans chapeau » (1996), « La Chair du maître (1997), « Le Charme des après-midi sans fin » (1997), « Le Cri des oiseaux fous » (2000)…
Puis Dany Laferrière est saisi d’une sorte de « fatigue », qui l’empêche d’envisager de nouveaux récits. C’est là qu’il accomplit un geste extrêmement rare, désarçonnant les critiques et les universitaires : il réécrit six de ses romans, augmentés parfois de 150 pages, aménageant des passerelles entre les livres pour découvrir qu’il s’agit en fait d’un seul et même bouquin : son « autobiographie américaine » qui lie le cycle nord-américain et le cycle haïtien. « J’ajoute, j’élimine, je touche au style, aucun scrupule. »
En 2009, pourtant, l’inspiration lui revient de la plus bouleversante des manières. Son livre « L’Enigme du retour » s’ouvre sur l’annonce de la mort de son père, contraint à l’exil depuis près d’un demi-siècle du fait de son opposition au régime de Papa Doc. Dany rentre donc au pays pour annoncer à son tour cette nouvelle à sa mère. Dans le carnet noir qui ne le quitte jamais, il note alors « tout ce qui bouge », scène de marché, sommeil d’homme ou mouvement d'insecte, en traversant son île « à la recherche d’une sérénité ». Publié aux éditions Grasset, traduit dans huit langues, ce magnifique roman de deuil et de transmission sous « crépuscule rose », au rythme poétique inouï, d’une simplicité de vieux maître dont « la mémoire se dégèle », s’écoule à 70 000 exemplaires et décroche le prestigieux prix Médicis. Ce retour en grâce l’encourage à s’installer à Paris et, plus tard, à postuler à l’Académie Française. L’audace est payante : en janvier 2013, le petit rêveur de Petit-Goâve devient le « collègue de Voltaire et de Montesquieu » et l’auteur de « Vers le Sud » entre sous la Coupole avec une divinité vaudou sculptée sur son épée, Legba, « celui qui ouvre la barrière pour passer du monde visible au monde invisible. En somme, le dieu des écrivains ».
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